Lapsus photobiographique :
Autoportrait
Du feu et de la réalité
***
Tik tak
Entre le tik et le tak, il se passe une éternité… je regarde mon portable, une
fois, deux fois, mille fois… je ne le lâche plus des yeux…
Je ne reçois aucun message… j'ai envie de pleurer, mais je retiens mes larmes… je sens que ma gorge brûle très fort…
Il est 1 h 30 du matin, il fait chaud… le temps se fond avec la chaleur et devient élastique… les secondes deviennent plus longues, chacune dure un siècle… je me vois vieillir, coincée dans l'abus de la subjectivité du temps…
j'ouvre le volet pour respirer, mais il fait lourd…
j'entends la musique un peu partout, c'est la fête dans la ville… les jeunes
crient, dansent et chantent dans les rues parisiennes, les voix sont de plus en
plus ivres… ils continueront jusqu'au matin, certains rentreront plus tôt par
l'envie de se coucher avec ceux ou celles rencontrés pendant la fête…
Nous avons un point en commun ce soir, moi et ces gens… nous ne dormirons pas
jusqu'au matin…
Je regarde l'heure : 1 h 35… aucun message affiché sur l'écran de mon portable…
je m'allonge par terre, sur le parquet en bois ancien, je regarde le plafond,
la lumière faible qui vient de l'extérieur crée des lignes lumineuses… je les
suis avec mes yeux, elles descendent sur le mur en face et disparaissent… je
vois ma famille entre ces lignes, le visage doux de ma mère et le regard
protecteur de mon père… mon visage devient trempé par des larmes qui coulent de
mes yeux jusqu'à mes oreilles et tombent sur le parquet… j'entends un bruit
très fort de l'extérieur, un pétard, et des cris qui le suivent… je sursaute en
pressant mon portable dans la main, mon cœur se bloque quelques instants et ma
respiration reste enfermée… les lignes de lumière disparaissent et tout devient
noir… mes sanglots se perdent rapidement dans les hourras des gens en fête…
Tik… Tak… je change de place
plusieurs fois dans la nuit, mais je n'arrive à dormir que vers le matin…
l'alarme me trahit et me réveille… avec le peu d'énergie que j'ai, je cherche
mon portable et j'arrête l'alarme pour pouvoir regarder mes messages…
aujourd'hui aussi sera un enfer… je regarderai les lignes lumineuses sur le mur
et j'imaginerai le visage de ma famille…
Je n'imaginais jamais comprendre la guerre de si près ; même si ce n'était
qu'une guerre de douze jours… je l'ai refoulée immédiatement après le
cessez-le-feu… mais je sens un poids sur ma poitrine qui m'empêche de respirer
ou de parler, je sens une blessure derrière mon cœur qui va peut-être
apparaître un jour, et ce vide angoissant qui me fait trembler à l'intérieur de
moi…
Je ne serai plus la même personne que j'étais il y a deux semaines… je pense
fort à tous ces gens qui subissent la guerre depuis des années et à ceux dont
les proches sont sous les bombes… je comprends maintenant qu'il ne restera rien
de beau pour vivre, mais juste une tentative de survivre…
Ma tête est paralysée et je confronte une sorte de vide où une voix répète avec
la peur : AGIR.
Je pense à ceux qui contrôlent aveuglement la vie des gens ; ces
dirigeant, présidents, hommes religieux et politiques, qui n'ont aucun souci de
l'humanité…
Mais aussi je pense aux écolos qui ne réagissent pas contre la guerre qui détruit les sources de la nature, modifie le climat, tue les gens et anéantit l'humanité… ne suffira-t-il pas, autant de prétention de l'humanité ?
29 juin 2025
بی دلیل
دلم میخواهد بخندم،
از عمق وجودم ،
بیهیچ عذاب وجدانی،
دور از هر دردی ،
تنها از سرِ سرخوشی.
دلم میخواهد
چون کودکی بازی کنم،
با دستان و پاهایی گِلی
به خانه بازگردم،
و تا همیشه،
تا پایانِ بودن،
گرمای دستان پدر و مادر
بر شانههایم بماند.
میخواهم
بخندم،
بیهیچ دلیلی
Le Choc
Je comprends maintenant, de manière concrète, ce
qu'implique l'état de sidération provoqué par un choc. C'est une suspension du
temps, une paralysie intérieure où le cerveau devient gelé.
Les jours ressemblent à des cauchemars prolongés, et les nuits refusent le
sommeil…et la fièvre s'installe …
Les gens de mon entourage sont eux aussi sidérés. Chacun réagit à sa manière, souvent maladroitement. Certains ne savent pas quoi dire et gardent le silence — ils sont nombreux. D'autres prononcent des paroles blessantes, peut-être sans le vouloir. Il y a aussi ceux qui s'éloignent, incapables de faire face, et ceux qui feignent que tout est normal. Mais il y a pire encore : ceux qui, sans la moindre attention à ce que je traverse, viennent me parler de leurs petits tracas, comme si la gravité de ce que je vis n'avait aucune existence.
Je suis incapable de traduire ce que je
ressens. La tristesse est là, l'inquiétude aussi.
C'est un traumatisme en temps réel.
Quelque chose brûle à l'intérieur de moi, près de la gorge…, mais je dois faire
comme si de rien n'était…
Les mots deviennent encore une fois
insuffisants.
Ce qui aide cette fois, c'est la présence humaine …un regard protecteur posé
sur moi pendant une réunion au travail, une main qui prend la mienne en silence
quand l'angoisse m'étouffe. Une tape sur l'épaule qui me rappelle que je ne
suis pas seule… c'est si simple…il ne s'agit pas d'expliquer, encore moins de
consoler. Il s'agit simplement d'être là quelques secondes…
Ce qui m'est toujours aussi incompréhensible, c'est la violence politique —
cette brutalité des pensées, rationnalisée, planifiée, justifiée par certains
dirigeants et sous certains drapeaux…
La guerre, avec ses destructions, ses humiliations, est déjà une absurdité.
Mais ce qui me sidère encore davantage, c'est la façon dont certains la
défendent avec calme, la mettent en œuvre froidement, derrière des discours humanitaires,
des masques, des sourires fictifs. Une ruse constante.
Les masques et les mensonges sont à l'opposé
de ce que je conçois comme une vie juste.
Je suis contre cette manière de penser selon laquelle chaque problème politique
ou social aurait une solution militaire, et contre ceux qui, au lieu d'imaginer
le soin, choisissent la force.
19 juin 2025
Trace...
Certaines peines et inquiétudes sont si profondes que même l'écriture reste impuissante pour les effacer.
Mes doigts reposent sur le clavier depuis une heure… Les images diffusées par les médias depuis ce matin attaquent cruellement mon cerveau, telles des escadrilles surgies d'hier, dans ce Moyen-O. Une image, surtout, s'est gravée dans ma mémoire avec une violence inouïe, et refuse de me quitter … c'est une large tache sur un mur, dessinée comme une étoile…
Elle n'a rien des étoiles douces et lumineuses de Van Gogh… elle n'a rien du calme de La Nuit étoilée. Elle relève plutôt de la cruauté évoquée dans Guernica… c'est une étoile de sang, figée sur le mur, empreinte de mort … et de brutalité.
C'est une vidéo amateur, filmée juste après l'attaque... on y voit la fenêtre d'un immeuble touché par un missile, et en face, sur le mur d'en bas, cette étoile sanglante… elle marque la chute d'un habitant…
La violence est partout dans cette histoire … dans les récits politiques qui ont précédé l'attaque depuis des années et des siècles, dans l'attaque elle-même, dans ce qui vient après... elle est aussi dans la voix neutre de l'homme qui filme… et dans mon écriture aussi…; enregistrer la violence — par les mots ou par l'image — n'est-t-il pas, d'une certaine manière, une forme de violence ?
Un Homme partisan d'étoile en a tracé une sur ce mur àjamais...
J'aime mes amis étoilés, j'aimais mes amis qui sont devenus étoiles...
Non à la violence ... mais comment ?
Vendredi 13 (!) 2025
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Dehors...
Pas d'inspiration... parfois, la vie devient, neutre, fade, sans goût...
J'essaie de penser à une anecdote pour motiver mon écriture, mais je ne trouve
qu'une page blanche dans ma tête…
Un voile couvre tout. Je regarde par la fenêtre : le ciel est gris, un chat
miaule chez le voisin, et rien d'autre.
Je ressens la fatigue, mais je me force à
trouver une histoire qui me motive… Une gêne profonde s'installe en moi...
Je vois le visage d'une jeune fille qui ne me regarde pas quand elle parle, et
une autre femme qui m'ignore volontairement.
Je vois cet homme assis à côté de moi, qui parle avec tout le monde sauf avec
moi.
La fenêtre s'ouvre sous la force du vent, faisant bouger le rideau de dentelle.
Je tourne la tête vers la dame assise à ma droite et j'essaie de dire un mot,
mais ma voix est faible, elle se mêle aux autres voix et disparaît rapidement.
Personne ne s'en aperçoit.
Ils continuent à parler, à rire.
Je souris et fais semblant de les écouter.
Le rideau se soulève plus fort, une poussière
orange envahit l'air extérieur.
Une porte claque, un chat hurle…
L'homme à côté de moi ne tourne jamais la tête vers moi. Il parle avec ceux
d'en face, il sert à boire à tout le monde, et remplit discrètement mon verre.
Mais il ne me dit rien.
Tous parlent entre eux, en m'ignorant.
Quelques mots pâles, comme une fleur à la fin de l'automne, sortent de ma
bouche.
Mais ils s'envolent par la fenêtre ouverte, tels des papillons malades.
Je sens, visiblement, que l'on m'ignore, sans
comprendre pourquoi. Je ressens un malaise.
Je sens que je n'appartiens pas à ce monde, que je ne devrais pas être assise à
cette table. Le chat hurle plus fort...
Un homme entre dans la pièce et dit bonjour. Il me regarde brièvement, puis
détourne les yeux.
Tous évitent mon regard.
Les rideaux dansent, poussés par le vent, vers l'intérieur et l'extérieur.
La fenêtre s'ouvre et se referme avec fracas, mais personne ne semble
l'entendre… sauf moi.
Les conversations continuent, insignifiantes :
anecdotes de lycée, souvenirs d'anciens camarades…des ex...
Personne ne me demande mon avis. Je n'en ai pas. Je n'aime pas leurs histoires. Peut-être le savent-ils.
Ils rient plus fort, autour de cette table ronde.
Le chat crie de douleur. Je pense que je dois l'aider.
Je ne comprends pas pourquoi il ne pleut pas. L'air est si poussiéreux. Je commence à tousser.
La fille à côté de moi me regarde. Je suis gênée. Je bois de l'eau. Je ne parle pas...
Mais les autres parlent, le vent parle, le chat aussi.
Ma bouche est ouverte, comme la fenêtre...
J'ai envie de dire quelque chose, mais aucun mot ne vient.
Je me sens comme une ... mauvaise herbe. ils me font sentir ça...
Je le lis dans leurs regards, dans celui de l'homme à côté de moi, dans celui
du chat qui crie.
La table ronde commence à tourner, comme la
grande roue des Tuileries, la roue de la place de la Concorde. La palce... je répète ce mot dans ma tête, comme toujours... ce n'est pas ma place...
Ils me le font comprendre, par leurs regards fuyants... par une hésitation qui se trouve dans leurs gestes...
L'ambiance est froide.
Je sais qu'ils attendent mon départ.
Je sais qu'ils parlent de moi quand je suis loin.
J'entends dans leurs regards : Ce n'est pas
ta place.
La table ronde rétrécit.
Le cercle des gens se referme.
Ma chaise s'éloigne.
Mon verre tombe au sol.
Ils continuent à parler.
Leurs mots deviennent semblables, monotones.
Et tous répètent, d'une voix grave : Ce n'est
pas ta place.
La petite table ronde tourne de plus en plus
vite.
J'ai la nausée.
Ma tête tourne aussi...
Le chat crie au loin.
La poussière m'étouffe.
Je me lève.
Je dis quelques mots sans forme, sans sens... personne ne m'écoute...
Mais une seconde de silence trahit leur conscience de mon départ. Leur regard change. Il n'y a plus de gêne.... ils sont soulagés maintenant...
Je m'éloigne de la table ronde.
Je sors.
Dans le jardin, je croise un homme ... il lit un livre...
Il murmure, en me fixant dans les yeux ... l'Histoire a toujours connu des gens comme eux... cette petite table ne t'appartient pas...mais le monde entier...
Le vent s'arrête soudainement...
La fenêtre ne claque plus...
Le rideau effleure doucement la terre.
J'observe l'homme qui continue à lire tout en me regardant...
Je m'approche doucement de lui...
Une place libre est à ses côtés...
Je m'assois ... je me sens à ma
place..
Le décalage identitaire lié au transfuge social et à la violence qui en découle, ne se limite pas seulement au départ d'un milieu socio-culturel défavorisé vers un milieu favorisé, mais il peut aussi se produire dans le sens inverse. Une personne qui expérimente une baisse de niveau social ne doit pas seulement supporter le choc externe, mais elle doit aussi subir une pression intérieure forte liée à la perte de son identité. Cette identité se retrouve confrontée à un manque et à un état de contradiction émotionnelle, car, bien qu'elle puisse se sentir supérieure aux autres, le nouveau milieu social lui fait comprendre qu'elle est inférieure, n'ayant pas les mêmes normes que celles et ceux qui appartiennent à cette nouvelle couche sociale.
26 mai 2025
Les aveux voilés…
Il écoute attentivement ce que je lui dis à propos de son aide, puis répond :
— Il y a des cadres… des cases différentes : celle de la famille, celle des amis, celle du travail, des connaissances… tu n'entres dans aucune de ces cases. Tu n'es pas une amie, tu n'es pas une collègue, je ne travaille pas avec toi, tu ne m'aides en rien… tu n'es pas une aide.
Je l'ai regardé, un peu échauffée par le grand verre de bière belge, et j'ai éclaté de rire. Je lui ai dit :
— Tu es très sincère… du coup, tu ne me considères pas comme une amie ?
Et j'ai rigolé encore plus fort.
Il m'a regardée, l'air peut-être un peu étonné, parce que pour lui, ses paroles n'avaient rien d'étonnant.
— Mais moi, je te considère comme un ami, et tu m'aides beaucoup, je lui ai dit.
— Pas toi, tu ne m'aides pas. Et mes amis, ce sont tous, mes vieux amis, ceux que je connais depuis longtemps…
J'ai ri encore plus fort :
— J'adore ta sincérité ! Donc, je n'existe pas pour toi…
— Si, si, bien sûr… Tu comprends ce que je veux dire … ce n'est pas péjoratif, ce que je dis…
— C'est quoi alors ? Je suis quoi pour toi ? je lui ai demandé, sans trop savoir pourquoi j'insistais autant pour avoir une réponse.
Il m'a regardée :
— C'est un plaisir…
Je ne sais pas vraiment comment je devais interpréter cela. Pendant tout le trajet, j'y ai pensé. Mon existence représente pour lui une forme de plaisir, sans qu'il me place dans une case précise — ni amie, ni famille, ni collègue, ni même une inconnue…
Ces derniers mois, il a été l'unique interlocuteur face à mes problèmes, à mon état qui se ressemblait à une sorte de dépression. Il me posait des questions, attentivement, sur mon état, sur ce que j'avais fait, sur ce que j'avais l'intention de faire. Une forme de protection verbale, très simple, mais qui, pour moi, ressemblait à une petite lumière. Une lumière qui me donnait des signaux ; pour me dire que j'étais encore vivante.
Durant tous ces jours où je me battais simplement pour survivre, une seule question de sa part suffisait à me rappeler que je pouvais continuer à lutter, tant qu'un regard était encore posé sur moi. Et ce regard, c'était le sien. Il était — et il est encore — une aide pour moi, peut-être même sans qu'il le sache. Peut-être c'est pour cette raison que je n'ai pas mal réagi à sa phrase si blessante.
Sa présence, son aide et son attention me rappellent celles que j'avais moi-même envers certains de mes amis… ceux et celles qui m'ont laissée tomber dans cette vallée obscure, sans jamais se soucier de ma lente disparition. Personne ne s'en est rendu compte… et je me suis finalement réfugiée vers cet inconnu que j'ai l'impression de connaître depuis toujours. Je l'ai su dès notre première rencontre.
Je continue à marcher vers chez moi. Il est tard, je suis un peu ivre, et je pense à ces mots qu'il a prononcés… "tu es un plaisir". Mon état d'ivresse ne m'aide pas à en analyser le sens… mais je sais que cette phrase révèle une prise de distance de sa part. Il caractérise ses relations selon des cases bien définies et insiste sur le fait que je n'entre dans aucune d'elles ; c'est un rejet assez explicite qui est à l'opposé de « tu es un plaisir ».
Mais soudain, une flamme chauffe mon esprit : ce n'est pas la première fois qu'on me dit cela. En pensant à ma vie et à mes relations avec des gens que j'aimais, je me rends compte que j'ai souvent été considérée comme hors cadre, hors case — et on me l'a dit à plusieurs reprises. Ma tête tourne et j'ai du mal à comprendre ce que cela représente. Mais je suis consciente d'une chose : moi-même, j'ai toujours tenté de fuir les cadres prédéfinis… les normes sociales imposées.
Mes relations ont toujours été compliquées, qu'elles soient amicales, intimes ou amoureuses.
J'ai toujours cherché des personnes spécifiques (volontairement ou pas) — des êtres différents, ceux qui portent un trésor caché au fond d'eux-mêmes, ceux qui restent fidèles à leur for intérieur, à leurs origines, à une essence dont j'ignore le nom…
Pourquoi classifier les liens ? pourquoi rester sur une vision très structurée et rigide dans les relations humaines ? pourquoi se protéger de l'établissement d'un lien profond ? Pourquoi avons-nous souvent peur d'assumer nos relations les plus pures et profondes, ces relations qui sont les plus réelles mais qui restent parfois discrètes et derrière un simple regard ?
D'une part, cette classification diminue l'ambiguïté et nous crée une identité précise qui clarifie les attentes de la société de nous, mais d'autre part, comme l'explique Erving Goffman dans La Mise en scène de la vie quotidienne, chaque individu joue un rôle social, selon le contexte, et adapte ses comportements à ce que la "scène sociale" attend de lui. Classifier les liens (ami, collègue, partenaire, connaissance, etc.) nous pousse à être dans une hiérarchie sociale.
Les cases sociales limitent nos rapports à autrui et à nous-mêmes, réduisant nos vastes dimensions humaines derrière des lignes rouges qu'il ne faut pas franchir. Nous devenons alors des êtres unidimensionnels, fragmentés et réduits... très réduits ... et hors de ces cadres, nous nous sentons vulnérables.
En réalité, nos identités sont construites sous une forme réduite voire sociale, et c'est cette identité imposée qui écrase et détruit notre immense identité personnelle. Ressembler à notre véritable identité nous effraie, et conséquemment, le fait de sortir des normes sociales nous semble injustifié.
Être
éloigné de soi est devenu la norme...
Je préfère être "anormale"... et hors case...
10 mai 2025
Un souvenir du passé
Certains des gens semblent être trop à l'aise avec la vie… DD en fait partie. Quand je le regarde, je ressens une aisance profonde dans sa manière d'être, dans ses comportements, son regard… On dirait qu'il a les mêmes dimensions existentielles de la vie.
En observant cet inconnu, j'ai l'impression que mon espace-temps s'agrandit et se fusionne avec le sien... Nos mondes se croisent délicatement sans qu'il s'en rende compte..
Il traverse spontanément mon territoire personnel… une occupation agréable de mon esprit.
Je ressens seulement une vague fugitive qui coule doucement dans mes veines et vibre les micromolécules de mon existence...
Il est construit d'une matière que je ne connais pas… une matière douce à toucher qui reste intouchable...
Il est l'Eau.
Il est transparent…
J'ai envie de m'y plonger.
J'ai un grand respect pour lui.
Je découvre, au fond de lui, quelque chose qui m'appartenait dans un passé ou un futur : une essence existentielle, ou une connaissance comme la conscience intentionnelle husserlienne...
***
Ces derniers temps, je pense aux différents aspects et définitions de l'amour, de l'amitié et des relations qui se construisent autour de ces notions.
D'un point de vue biologique, tout se résume à un équilibre chimio-hormonal, et selon les hormones, cela peut perdurer ou disparaître !
D'un point de vue philosophique, la séparation de l'agapé, de l'éros et de la philia me semble absurde. On perçoit immédiatement le manque dans chacune de ces définitions, ce qui montre les difficultés liées à l'amour...
Je m'oriente plutôt en ce moment vers une définition sociologique ...; il me semble que le coup de foudre n'est qu'un moment de retrouvaille du modèle social de l'amour que nous construisons depuis l'enfance dans notre tête, à travers l'observation et l'expérience, en observant les relations des parents, l'éducation, les films, les livres, les images... chacune de ces expériences de vie, nous donne un morceau de puzzel pour compléter cette image au fur et à mesure... mais elle reste inconsciente ... lorsque qqun correspond à cette image, on pense que nous sommes tomés amoureux ou amoureuses.. Néanmoins c'est seulement un moment de la manifestation concrète de cette image absente ; ce qui nous trompe... une consolation mentale de notre cerveau frustré qui reçoit le plaisir d'une image « réelle » en dehors de soi.
Et cette personne n'est donc pas sa moitié perdue, mais elle est le reflet d'une mémoire inconsciente dans les profondeurs de ses pensées..;
s'agit-t-il donc de l'amour?
je ne sais pas... mais je sais que ce qu'on appelle l'amour (biologique ou philosophique) m'a tjrs fait mal... par son manque, par sa perturbation, par son égoïsme.. ;
dois-je me confier à cette image appaisante construite délicatement dans ma tête pendant des années ? ou à l'amour passionnée ?
DD. me rappelle cette image, sans qu'il y ait la connaissance ni l'amour ... simplement un regard…
Je dois reprendre la thèse…
Il fait beau…
Je vois J.T qui s'approche. Je fais semblant que je travaille…
21 sep 2020 – 16h 45
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" که عشق آسان نمود اول "
Imagine que je sois transparente, que je n'existe pas... imagine que je sois une ombre, que je sois une trace du passé. Imagine que mon corps n'ait jamais touché le tien, que nos yeux ne se soient jamais croisés. Imagine que tu n'aies jamais entendu ma voix ou mon sourire, et que tu ne m'aies jamais tenu dans tes bras jusqu'au matin. Imagine que je ne t'ai jamais aimé.... Imagine que je ne sois même pas un souvenir...
Peux-tu imaginer la non-existence de l'existence ?
04/01/2024
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Apothéose
J'ai pris un jour de congé… Je me sentais fatiguée depuis plus d'une semaine, mais hier, tout d'un coup, je me suis retrouvée vide, totalement vide ! Je n'étais ni triste ni heureuse. Pas de sentiment, pas de motivation, pas d'étincelle… comme un verre vide…
J'étais tellement vide que j'imaginais ma mort imminente. Mais je n'étais pas déprimée. J'étais comme un appareil qui s'éteint soudainement. Ce n'était pas triste, c'était juste la fin de l'énergie que je contenais. Il suffisait de me brancher… mais je ne savais pas comment ni où je devais me brancher ! Quelle était la source de cette énergie en moi qui a disparue. J'y ai pensé toute la journée et cela m'a frustrée. J'ai donc pris un jour de congé.
Aujourd'hui, je me suis réveillée assez tard, j'ai pris un petit-déjeuner copieux ... j'allais bien mais je savais qu'il manquait quelque chose en moi… je suis sortie, direction Père-Lachaise, puis Bastille puis Sainte Antoine. Je me suis arrêtée devant l'église et j'y suis entrée sans réfléchir. J'ai jeté un coup d'œil rapide à quelques touristes qui marchaient lentement et observaient les murs et le plafond… je pense que le seul endroit où les gens lèvent les yeux vers le haut est l'église. J'ai cédé à la force de mon inconscient et me suis assise sur la première chaise. J'ai regardé les grandes fresques pendant quelques secondes, mais un jeune homme a attiré mon attention plus que les fenêtres colorées ; il était assis au premier rang, loin de moi, et dessinait sur un petit carnet. Une force m'a poussée à nouveau à me lever et à me rapprocher de lui. J'ai choisi un endroit d'où je pouvais bien le voir ; son croquis et aussi lui-même. Il avait l'air calme, apaisé. Il regardait le toit toutes les quelques secondes et ajoutait quelques lignes avec méticulosité. En le regardant, des images me sont revenues en mémoire, celles d'un dessin dans un parc avec les camarades de classe.
Tout le monde dessinait des arbres, moi, j'ai dessiné le professeur en train de dessiner des arbres… il a aimé mon dessin, j'étais heureuse… le jeune homme a senti mon regard et a tourné la tête vers moi… mon regard l'a perturbé… il a continué à dessiner, mais j'ai senti qu'il n'était plus aussi concentré qu'il l'était quelques seconde auparavant… je l'avais sorti de son monde intérieur. Je n'ai pourtant pas bougé. Ces moments me plaisaient et j'ai continué à le regarder, il tournait la tête de temps en temps pour me voir et continuait à dessiner… j'avais envie de me rapprocher de lui et de parler de son dessin… cette envie a créé une petite histoire dans ma tête, on parle à l'église, puis on se voit dans un bar, on dessine ensemble et il m'invite chez lui… j'ai arrêté l'histoire immédiatement et mon imagination galopante dans une église m'a fait rire intérieurement. J'ai vu un homme expliquer à son fils comment plier le genou et s'incliner devant la grande arche au fond de l'église. L'idée qu'il ait un créateur avec lequel je puisse communiquer m'a tout de suite plu (comme Pinocchio qui parle à son sculpteur !). Mais je ne lui ai pas parlé. J'aimais ce calme qui était venu s'installer en moi et je laissais certaines pensées et images vagabonder doucement dans ma tête. Soudain, j'ai senti que le froid commençait à me gêner et je me suis demandée pourquoi on ne chauffait pas les églises ? J'ai fermé les yeux et j'ai commencé à faire un croquis, mais avec mon imagination. J'ai dessiné la scène devant moi, les chaises en bois, le jeune homme avec son carnet, les bougies, les tableaux, les détails des sculptures, le grand orgue à ma gauche, le père avec son enfant, la femme vêtue de noir, la fille qui tournait en rond et qui m'avait l'air folle, et les grandes fenêtres qui montaient jusqu'au toit et qui poussaient mon regard vers le haut… j'avais la tête levée comme les autres…
J'ouvre les yeux et me lève. Je passe devant le jeune homme sans le regarder et je fais demi-tour vers la sortie. En sortant une femme s'approche de moi et me dit « vous êtes très jolie mademoiselle ; sa voix est comme une alarme matinale qui me réveille brusquement. Je la regard et je souris involontairement. Elle continue « vous avez un bon cœur mais votre premier amour ne vous a pas fait du bien » ; je souris encore plus en pensant que c'est tellement vrai. Elle me demande si je veux qu'elle continue et je dis non. Je lui donne une pièce et au lieu de dire « je ne crois pas à la prévoyance », je dis « je ne veux rien savoir de mon avenir » ! avec un visage déçu, elle s'éloigne de moi et s'approche d'une autre femme. Je prends le métro pour rentrer. Chez moi, je m'assois près de la fenêtre et je prends un café. En essayant de fermer le volet, je me rends compte qu'il fait chaud dans ma maison et cette chaleur bascule quelque chose en moi. Je me sens prête pour demain. …
22 novembre 2023
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Le vendredi 13 …
Je connais la superstition qui y est associée grâce à un livre d'Hervé Guibert. Personnellement, je l'associe au bonheur.
Ce jour m'a offert un cadeau, un sentiment que j'avais oublié depuis longtemps. Un état d'extase… je me suis sentie à nouveau amoureuse, de qui ou de quoi je ne sais plus. Quelle importance ?
Le désir est là, sans que je connaisse l'objet désiré… les mots se manifestent dans ma tête, ils tournent, et re-tournent… ils se forment ; ils se succèdent à leur guise... ils créent une image…
Je me sens bizarre au travail et insaturée ! J'ai le livre d'Annie Ernaux en tête, mais seulement le titre… je répète « La Place »… mon inconscient sait certainement pourquoi… mais pas moi … _ je sépare mon inconscient et mon conscient, … je suis totalement divisée en deux, un conscient au milieu de la salle D… pour le pot de départ d'un collègue, et un inconscient qui erre hors de l'espace-temps et qui a un accès direct à cette essence que l'on ne connaît qu'en dehors des barrières charnelles_ …j'ai toujours pensé que mon inconscient était plus intelligent que mon conscient ; qu'il était capable d'analyser des milliers de données individuelles et collectives et de créer un pressentiment soudain qui me fait avancer ou reculer …
Je me répète dans ma tête … La Place… et soudain, je sais que je ne suis pas à ma place… je me sens comme un passager d'une autre planète, comme un extraterrestre perdu. Je m'éloigne des gens et je m'assois seule sur une chaise dans un coin de la pièce, en faisant semblant d'avoir mal au pied. Je regarde les personnes en face de moi ; l'image change dans ma tête, cette fois, ces gens deviennent des extra-terrestres. Le verre de vin que je tiens dans ma main sent mauvais, comme le raisin moisi… mais je continue à boire. J'écoute les conversations, les mots… les mots sont jolis… les phrases ne le sont pourtant pas… elles sont vides. Elles sont comme des moules remplis de rien… remplis de vide (en considérant le vide comme un objet). Je bois encore du vin … j'ai la tête qui tourne, cela m'indiffère, je veux donner plus de chance à mon inconscient qui se réveille… je répète encore, La Place.
Je ne me sens pas à ma place, mais je ne me sens pas inférieure,… et ce sentiment narcissique de supériorité me met mal à l'aise… la place, la culpabilité… le vin moisi… les mots… les gens… je continue à les écouter et à les regarder, ils sont si gentils et souriants. Mais ce n'est pas stimulant, je me sens horriblement mal de les observer avec un regard si distant, si égoïste… je continue à boire.
Je me sens exclue, et je l'ai sentie à plusieurs reprises dans ma vie. Je ne sais plus où je suis, … les portes du présent se ferment et celles du passé s'ouvrent brusquement.
…il y avait une dame dans la salle à laquelle je pouvais m'identifier et elle est partie rapidement après le discours du président. Elle me semblait sérieuse et quand je pense à elle, je sais qu'elle avait compris où etait sa place … elle m'a souri avant de partir, les autres étaient dans un autre monde.
Ce hors-place ne sera pas ma place pour toujours.
Vendredi 13 octobre 2023
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" Écrire, est-ce le rêve de suspendre la mort, tenter comme Shéhérazade, de gagner une nuit, puis, une autre… et encore une autre, pour reculer la sentence, obtenir un sursis sur l'échéance fatale ? Écrire, [...] c'est un pari insensé, celui de séduire, celui de survivre."
Lydia Flem, La Reine Alice, p.208.
Ashti
کودک درونم سیب گاز میزند
سیب حوا را
و
نگاهی معصوم در بیگانگی هوس ای آتشین مرا تا عرش خدا بالا میبرد
سلامی میکنم و باز میگردم به زمین
و خود را در شوخی طعنه آمیز الهی تا ابد گم میکنم
12 juin 2023
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Je suis la porteuse mortelle d'une substance immortelle qui est "la passion".
Indicible
J'ai toujours pensé que je n'arrivais pas à trouver les mots justes, pour m'exprimer et/ou exprimer certaines pensées profondes … Mais je me demande actuellement si ce ne sont pas les mots qui sont incapables et impuissants à révéler la grandeur des perceptions, des impressions, des sensations et des réflexions ? Ces mots qui sont adaptés pour exprimer et expliquer le monde extérieur, autrement dit ce qui est commun entre les humains en dehors de soi ; un monde concret basé sur ce que l'on peut observer, toucher et entendre. Pourtant, ce qui est de nature interne ne peut pas nécessairement être semblable entre les individus, car ce sont seulement les mots qui les rendent visibles ; ces mots fragiles et précaires qui ne sont pas aptes à distinguer les frontières de l'imaginaire et du réel ; ces mots dont le sens n'est construit que sur un accord préalable entre les humains.
L'indescriptible vérité intérieure – cette petite boule qui monte souvent à la poitrine sans pouvoir être exprimée – explose un jour par une création esthétique et sans l'usage des mots, sous la forme d'une image.
Hélas, souvent l'image de la pensée ne peut pas être photographiée et reste une « Image fantôme », sa manifestation, comme un « Jardin d'hiver », est hors de propos pour révéler son « noème »; et son « punctum » n'apparaît que dans l'imaginaire, créant une scène comparable au « bac du Mékong ».
26/avril/2023
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Différent.e
Je me sens ... différente ; pas supérieure mais différente, pas inférieure mais différente…
Être soi-même, c'est être unique ...
18 avril 2023
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Creation
You are here because I created you
Your story had already started in my head, long before you were there
You are here, because I wanted you
I know your whole story, until the end
you will end up in tears
And you won't talk to me about destiny anymore
Because there is no
I could change your sad ending...
Because I'm always surrounded by emotions.
27 mars 2023

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8 mars ; journée internationale des droits des femmes. ,
Je pense à Annie Ernaux ...
Pour elle, l'événement qui semble avoir été fortement traumatisant dans son existence est l'avortement clandestin qu'elle a subi en 1963 et qui a failli lui coûter la vie. Cette expérience fait également partie des souvenirs indépassables, de ceux qui peuvent avoir une incidence profonde sur l'identité d'une femme.
Je voulais témoigner. Cette expérience a changé ma vie d'une façon extrême : il y a un avant et un après. D'où le titre : l'Événement. J'ai été confrontée à l'inimaginable, à l'inouï. On sait que l'on peut en mourir, mais on affronte quand-même la mort. On a du mal à comprendre ce qu'est l'absence de loi, ce que signifie être totalement dans l'illégalité, dans la quête d'une personne pour vous donner l'adresse d'une avorteuse, ou pour vous prêter de l'argent.
Annie Ernaux, « J'ai toujours été persuadée que rien n'était jamais gagné pour les femmes », entretien avec Mina Kaci, in L'Humanité, février 2014.
8 mars 2023
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Puis-je devenir la même personne, après avoir lu et écouté Simon de Beauvoir, Simone Veil, Annie Ernaux, Gisèle Halimi et après avoir connu VM ?! Et après avoir dépassé les barrières, mes limites... après avoir vu et lu la souffrance des femmes ?
Impossible ! Je ne peux ni ne veux ...
La révolte coule dans mon sang...
La révolte est rouge...
28 février 2023
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Un dimanche,
Je fais du bricolage, (DIY[1]) c'est peut-être la première fois!
C'est fatiguant, mais c'est un travail qui me plait. Je roule une cigarette.
J'ouvre une bouteille que j'avais mise dans le coin du dressing depuis quelques mois pour une bonne occasion!
Je ne sais pas lequel m'est le plus cher, le vin ou l'ami qui me l'a offert...
J'ai un moment pour moi,
Un bonheur narcissique à l'abri des autres...
[1] Do it yourself
19 février 2023
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و تنها آویختن پرده ای سهم مرا از تماشای خورشید گرفت
به همین سادگی
Et seulement accrocher un rideau m'a empêché de regarder le soleil
Aussi simple que cela.

12 février 2023
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Entre être et ne pas être,
il n'existe qu'un instant,
qu'une pensée suspendue dans le temps,
qu'un mot caché derrière les barrières d'une existence perdue
Février 2023
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Les mots
Le langage n'est pas le meilleur dispositif de communication. Les mots ne peuvent pas dire tout ce qui se passe dans les cerveaux ; ils créent le malentendu, l'incompréhension!
Je m'en sers parfois mal, je n'arrive pas à me réconcilier avec les mots ; je préfère la peinture, la musique ou encore la photo qui transmettent instantanément ce que la personne veut évoquer... sans mensonge, sans masque...
17 janvier 2023

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Prison
Ces actualités...
Le son du cri d'une mère a serré mon cœur
Une mère dont l'enfant a été torturé et tué
Ma peau est enflammée par la douleur
Douleur qui a progressé jusqu'à la moelle osseuse
Tout mon corps hurle
Mille chaînes serrent mon corps
Quelqu'un pleure en moi
Je me sens étourdie
Le monde tourne autour de moi
Mon enfant intérieur a la nausée
Je deviens le cri
Que faire de toutes ces chaînes ?
Ces chaînes qui sont construites de peur et d'ignorance...

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Philia
J'arrive au travail, comme d'habitude un peu plus tôt ; j'aime ces petits moments où je me retrouve toute seule, où je me laisse aller dans le vide, un vide profond où rien ne me gratte l'esprit, où je suis à la fois proche et loin de moi.
Je m'assois sur un vieux banc en bois près de ce grand arbre aux branches tombées dont j'ignore le nom. J'ai encore un de mes écouteurs dans l'oreille droite et j'écoute « Tu jardín con enanitos » qui m'emmène lentement vers mon monde intérieur; la douce brise matinale qui caresse mon visage et qui ferme mes paupières jusqu'à moitié, se mêle à l'odeur du café et à la fumée de ma cigarette, créant un monde transparent autour de moi. J'y suis seule, seule et avec toi ; toi qui, avec la fumée dansante de la cigarette, t'approches doucement de moi et m'embrasses chaleureusement les lèvres.
J'existe éternellement dans ce monde qui n'est pas éternel et qui n'appartient pas au cosmos. Ce monde qui remet en question la Relativité et l'homogénéité de l'Univers ou des Univers. Je pense à son origine, sa création. Je pense à ce monde et à tous ces autres mondes parallèles qui surgissent constamment dans des trous noirs, si compacts, si intenses.
Dans cet horizon d'où aucune lumière s'échappe, je deviens une version pure de moi-même ; où tous les rayons se reflètent sur moi et se fondent en moi, en rotation, interminablement dans un seul instant qui s'immortalise dans l'association de mon corps et de ton esprit, dans l'interaction du matériel et du non-matériel.
J'atteins dans mes profondeurs la substance qui évoque une inquiétante étrangeté ; je me retrouve et je me perds en même temps... Le trou noir s'agrandit, je deviens espace, je deviens temps, je deviens ma propre essence, « ousia ».

Saghi 14 juin 2022
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Fond de l'être
D'une manière figurée, la vie de l'individu dont l'existence est un ensemble des « ça a été[s]* » qui représente chacun des micro-instants de la mort, ne se ressemble-t-elle pas à la photographie ? À chaque instant de la vie, le temps sépare l'homme de lui-même, de son propre « je » dans le passé comme une image dont le référent certain devient spontanément absent ; l'essence de l'homme n'est-elle pas ainsi liée à l'absence ?
Chaque instant de notre vie devient rapidement une absence ; notre essence est ainsi construite sur l'absence. Nous sommes presque absents de nous-mêmes dans le temps. On se sépare très rapidement et spontanément de notre passé et on n'est jamais présent au futur (sauf quand il devient le présent; l'instant!) ; nous ne sommes nous-mêmes qu'un seul petit instant ; voile pourquoi notre identité s'évolue ; puisqu'elle n'a qu'un seul instant présent et le reste n'est qu'une absence du passé ou une illusion du futur. Nous expérimentons la naissance et la mort d'une manière parallèle dans un seul instant!
* Roland Barthes, La Chambre claire, 1980.

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Plaidoyer
Je ne m'exprime pas en tant que féministe mais tout simplement en tant que femme qui a été touchée par de nombreuses difficultés liées à son genre, à son sexe, à son corps de femme ; les difficultés qui, malgré tous les efforts déployés au fil des années, restent encore à ce jour, négligées voire parfois méprisées.
Ces difficultés ont accompagné les femmes dès leur naissance et sont considérées comme des conditions normales de la vie quotidienne d'une femme. Elles sont considérés tellement normales,- qu'elles passent inaperçues pour les femmes elles-mêmes ; comme une réalité cachée dans l'ombre :
Ombre de l'ignorance, de l'éducation, de la lassitude, et de la peur... la peur d'être jugée, d'être rejetée par les pouvoirs, par les pouvoir musclés, par les hommes !
C'est ainsi que la femme, en tant que « deuxième sexe[1] », « sexe invisible » vous entendez bien, se fabrique, par la société, par l'éducation, par les hommes, mais aussi et bien malheureusement par les femmes.
Par ces femmes qui sont entrées aveuglement dans le jeu en assumant des rôles prédéfinis, écrits et imposés par les hommes au cours des siècles derniers : le rôle de la femme au foyer, le rôle de la femme qui ne lit pas, qui n'écrit pas, qui ne réfléchit pas, la femme qui vit en marge et ne sait pas partager ses pensées. La femme qui n'a pas d'idée et qui ne sait pas réagir face aux commentaires et aux comportements patriarcaux, un objet de manipulation que j'appelle « femme-corps ».
La femme-corps ; une femme qui redevient visible pour la société lorsqu'il s'agit de libido, de pulsion, de plaisir, de sexe, d'aventure, d'éros.
La « femme-corps », ne pense jamais à son développement personnel, elle reste passive, elle est vide. Ce n'est pas elle qui choisit où aller ni quoi faire, c'est la société qui décide pour elle, la société masculine par défaut, depuis des siècles, elle est une marionnette coincée dans la « caverne de Platon » et lui expliquer que la vérité est autre chose, demeure impossible.
La femme-corps subit la souffrance sans s'en rendre compte, sans y penser, sans pouvoir analyser ses conditions de vie... elle ne progresse pas et ne permet pas aux autres femmes de progresser.
Agir pour le droit de femmes commence par nous-mêmes ; le manque renvoie aux origines, à l'école, à la famille, aux ancêtres, aux croyances, aux habitudes, aux idéologies, ne faut-il pas commencer par la connaissance/la reconnaissance de soi et de ses droits humains pour retrouver la femme, la vraie femme qui demeure en nous ?
[1] Simone de Beauvoir, Le Deuxième sexe, 1949.
Juin 2022

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" و بدانیم اگر کرم نبود زندگی چیزی کم داشت "سهراب سپهری
La Place
Je pense à la place…
À ma place,
À ma place dans le monde, dans le temps, dans le passé, le présent. Je pense à la place que j'aurai dans le futur. Je pense à ma place en tant qu'être humain, puis en tant que femme. Je pense à ma place comme un esprit ou un corps. Je pense à ma place dans l'univers ou en tant qu'univers, à ma place à l'intérieur de moi, et hors de moi. Je pense à ma place parmi les autres, ma place dans la société et à ma place dans l'interaction du moi et des autres. Dans l'interaction du passé et du présent.
À ma place au carrefour de mes pensées et celles des autres…
Je pense aussi à ma place collective et à celle individuelle et intime aussi. Je pense à ma place dans l'imaginaire, dans la vie, et après la mort. Je pense à ma place symbolique. Je pense à la place où je devrais être et que je n'y suis pas. Je pense à la place où je ne devrais pas être et que j'y suis. Je pense à la place que le monde m'offre et à celle qu'il m'enlève. Je pense à la place qui n'existe pas.
Je pense à toutes les places que je n'ai pas.
Je pense à la non-place
Je pense à une place vide…et aux places prédéfinies...
Je pense à la place … à la place qui mène à l'existence ou à la non-existence.
Je pense aux places qui me restent, à prendre ou à perdre...
20 avril 2023
Ce n'est que mon côté sombre qui allume mon existence...

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L'ombre, n'est-elle pas la meilleure preuve de l'existence de la lumière?
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